Triathlons et Cols Mythiques

Petites et grandes aventures sur les plus beaux triathlons de France et cols mythiques du Tour

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Embrunman 2022 : Finisher du mythe !

Longtemps délaissée, l’idée d’une participation à un Ironman ou plutôt à l’Embrunman 2022 avait germé en 2021. Aussi, les trop grandes incertitudes liées au COVID avaient mis ce projet au placard.

Comme déjà expliqué ici, c’est le retour à l’origine de ma venue au triathlon qui m’avait conquis : vivre une aventure !

Et l’aventure je ne pouvais plus que la retrouver sur le format de l’ultra distance. Ne plus se battre pour un chrono mais se battre pour franchir le ligne d’arrivée.

Embrunman 2022 : la préparation

Premièrement, et sans revenir dans les détails de la préparation, j’avais clairement affiché mon approche : pas de compromis possible avec notre vie de famille. En résumé, le volume consacré à mon entraînement serait le même qu’en 2021.

Certes, en volume, la préparation de cet Embrunman 2022 a été identique à la saison précédente. Mais dans la pratique, l’entraînement a été bien différent. Très peu de séances ont été faites au hasard.

Deuxièmement, à chaque entraînement, son objectif : l’endurance, l’intensité, la force, la distance, le dénivelé, les forts pourcentages, le cardio,…. Et puis chose nouvelle également, un gros travail sur le mental en pensant aux moments durs que l’on pouvait traverser sur ce genre d’épreuves. Donc parfois des sorties très longues à vélo, sans motivation et parfois très fatigué, pour justement se challenger et endurer.

Ce qui m’avait fait dire, qu’en fin de préparation, j’étais épuisé mentalement et physiquement.

Vélo : 3970km, course à pied : 619km, natation : 89km, tels étaient les compteurs 2022 avant le départ de cet Embrunman.

Pour finir, 7 jours au repos complet ou presque avec uniquement 3 séances à très faible intensité. Et puis 6 jours de préparation alimentaire, avec toujours, les précieux conseils de Nicolas Aubineau, diététicien nutritioniste. Une alimentation très saine, avec des quantités astronomiques pour emmagasiner l’énergie nécessaire à une telle épreuve.

Côté état d’esprit, une dernière semaine ultra détendu, presque inquiétant. Mes nuits sont bonnes, la transit est parfait. Rien à voir avec ma semaine précédant le Vercorsman en 2021.

Embrunman 2022 – Quel objectif sportif ?

Cette année est donc la dernière où j’essaie de me battre, à mon niveau, pour le chrono. Mais sur cette épreuve c’est vraiment spéciale. Compte tenu de mon inexpérience et des facteurs nouveaux à gérer (longueur de l’effort, réaction de l’estomac, mental, 1er marathon), c’est très difficile d’évaluer une performance globale.

Mais j’ai quand même fait quelques évaluations pour celles et ceux qui vont me suivre pendant la journée.

  • Natation – 3800m : entre 1h10 et 1h20
  • Transition 1 : 5min
  • Vélo – 186km – D+3800m : entre 7h et 7h30
  • Transition 2 : 4min
  • Course à pied (beaucoup plus incertain) : entre 3h50 et 4h25

Et j’ai complété cette évaluation par mon auto-évaluation par rapport à mon niveau :

  • Moins de 12h : Amazing, à l’américaine !
  • Entre 12h et 12h30 : Exceptionnel, toutes les planètes se sont alignées
  • Entre 12h30 et 13h : Très bon
  • Entre 13h et 13h30 : Bon
  • Au-dessus de 13h30 : Finisher, mais sans doute un peu de déception

Mais l’objectif principal ici reste de le faire et d’arborer la médaille et le t-shirt de Finisher à la fin de la journée !

Embrunman 2022 – L’avant-course

Une arrivée sur Embrun le samedi 13, soit 2 jours avant la course. Nous passons par la salle des fêtes pour récupérer mon dossard puisqu’il est possible de le faire dès le samedi. L’Embrunman est partout, sur les ronds-points, dans les rues, la ville vit au rythme de l’événement ce week-end. Ensuite direction notre QG du week-end dans la station des Orres, 15km au-dessus d’Embrun.

Vue sur la vallée d'Embrun

Je n’avais pas trouvé d’autres solutions, même si le fait de devoir parcourir ces 15km le matin du départ d’une course qui débute à 6h du matin ne m’enchantait pas particulièrement.

On découvre le package ainsi que les premiers cadeaux du participant. Pour le t-shirt et la médaille du finisher de l’Embrunman, il faudra aller les chercher 🙂 .

Embrunman : package du participant

Inédit pour moi, nous devons déposer obligatoirement nos vélos la veille de l’épreuve. Les vélos dormiront sur le parc de transition la nuit du 14 au 15 Août.

Après quelques activités le dimanche matin avec les enfants, cousins tous réunis, je m’absente vers 15 heures pour déposer mon vélo comme prévu.

Premier coup de stress en arrivant sur place, j’ai oublié mes ravitaillements personnels. C’est aussi une découverte pour moi. Compte tenu de la longueur de l’effort, nous avons la possibilité d’avoir nos propres ravitaillements. Ceux-ci seront déposés en haut du col de l’Izoard pour les ravitaillements vélo, et sur la ligne d’arrivée pour les ravitaillements de course à pied. Finalement je suis rassuré par un bénévole qui me confirme que nous pouvons les déposer le lendemain matin.

Deuxième coup de stress, tous les concurrents se présentent avec puce à la cheville, dossard et casque attaché à l’entrée du parc comme nous avons l’habitude de pratiquer sur les courses. Je n’ai rien vu de mentionné sur les documents officiels. Heureusement, c’est bien moi qui ai vu juste. Ouf, petite sueur froide et j’évite ainsi un aller/retour en urgence vers Les Orres.

Couloir d'entrée de l'Embrunman

Avant de pénétrer sur le parc à vélo, je ressens que nous ne sommes pas sur un triathlon standard : ici c’est l’Embrunman ! Ici, les spectateurs nous regardent d’une façon étrange. Mi rock star, mi extra-terrestre, c’est un peu déstabilisant cette sensation et flippant à la fois, comme si nous allions à l’abattoir 🙁 .

Passage des contrôles d’identité obligatoires, émargement, et nous pouvons accéder au parc.

Embrunman : dépôt du vélo

J’ai bien pensé aux pluies menaçantes, j’ai donc apporté quelques sacs poubelles pour protéger le vélo pour la nuit. Le système d’attache de nos vélos est décevant pour un tel événement, pas top pour les vélos.

De la même manière, je récupère la fameuse caisse fournie par l’organisation dans laquelle nous devrons mettre tous les affaires que nous souhaitons apporter sur le parc vélo.

Dans la foulée j’assite au briefing. Idem, un peu amateur, problème de sonorisation, un peu long. Au bout de 45 minutes je sature et je quitte les lieux.

Liste des participants de l'Embrunman 2022

Nous expédions la soirée au plus vite afin de pouvoir me coucher vers 21h30.

Et j’étais loin de me douter de la suite. Le cerveau se met à tourner en boucle et je vais dormir moins de 4h.

3h30, j’abdique, j’anticipe le réveil programmé à 3h45. Heureusement que le sommeil de toute la semaine a été bon.

Surtout ne pas oublier de choses. Dernier repas à base du gâteau énergétique maison et une petite banane. Dommage le transit ne veut pas évacuer tout ça (le riz a tout colmaté 🙂 ), on verra cela plus tard sur le parc de transition

Même avec une liste pourtant claire, le stress me fait oublier ma bouteille d’eau pour m’hydrater jusqu’au bout. Ninnie va me dépanner.

Embrunman 2022 – En route pour une folle journée !

4h40 arrivée sur le site. Les concurrents affluent déjà en nombre. 5h je suis dans la file d’attente d’accès au parc.

Première bonne nouvelle, les pneus n’ont pas crevé pendant la nuit et le vélo est resté protégé.

Première action, porter les ravitaillements perso. Pour le vélo, je dépose 2 bidons de boisson énergétique (plus sûr car j’ai l’habitude des marques). Pour la course à pied, je dépose 2 flasques Salomon de 250ml d’eau. C’est plutôt le contenant dont j’ai besoin plus que le contenu.

Ensuite on organise les tenues vélo et course à pied à sa place. On papote avec les voisins sur nos expériences respectives. Pour l’un, un gros poisson, il a déjà fait 2 fois l’Ironman de Nice, avec un record personnel à 10h20. Pour l’autre, un Orléanais qui s’élance sur la distance XL pour la première fois, comme moi.

Le temps passe vite et à 5h30 j’enfile la combinaison pour faire un petit entraînement et ressentir les sensations de nager dans le noir.

A peine un petit 100m, l’eau est bonne, mais alors dans le noir on ne voit vraiment rien ! Cela promet !

Embrunman 6h du matin, départ natation

Embrunman 2022 – natation 3800m

5h50, départ des féminines, 10 minutes avant les bourrins, une pratique qui se généralise maintenant et que je salue.

Distance inédite 3800m, conditions inédites départ de nuit.

C’est un peu plus détendu que d’habitude sur la ligne de départ de l’Embrunman. Tout le monde a conscience de partir pour une longue journée.

6h le starter retentit, ça y est, l’Embrunman devient une réalité concrète 🙂

C’est cool, je suis incroyablement détendu même si je ne vois rien à part du brouillard à la surface de l’eau et un peu de buée dans mes lunettes.

Vue à la surface d'eau

C’est vraiment surréaliste, tu nages dans le noir et tu n’as d’autre choix que de te raccrocher à la meute en espérant que la tête de troupe ait pris le bon cap.

Nous avons quelques repères lumineux, à savoir des bateaux éclairés sommairement au loin. Mais impossible de distinguer les bouées que nous sommes censés contourner par la gauche.

Une seule obsession, relever régulièrement la tête pour garder le contact des nageurs devant et ne pas me perdre au milieu du lac 🙂

C’est chaud dans l’eau, le ménage est long à se faire. Je suis régulièrement chahuté. Je laisse faire, je reste focus sur ma nage.

2 boucles, la première de 2100m, la seconde de 1700m.

Enfin la première bouée en visu, on vire à gauche et cap vers l’extrémité du lac. Mes sensations sont plutôt bonnes. Relâché, les bras ne tirent pas.

Je suis surpris de voir des concurrents passer très loin à droite de certaines bouées, en réalité je ne sais pas comment ils font mais c’est juste qu’ils tirent une ligne droite. Comment font-ils pour se repérer ? Moi il me faudrait un chien !

Plus le temps passe et plus le jour se lève, on a la sensation de découvrir notre environnement c’est curieux et rassurant à la fois. On distingue maintenant les bords du lac.

Passage au premier tour, le jour est presque là. 37 minutes de course aux environs des 2100m, ça me semble être une bonne première boucle.

Embrunman, natation, passage au 2100m, première boucle

Ca donne de la confiance et de l’envie pour le second tour. Rien de particulier dans ce second tour à part arrivé au 3/4. Je prends un peu d’eau dans mes lunettes alors qu’elles sont restées sur mon nez. Finalement je comprends, j’étais en train de les perdre, l’élastique était remonté sur le haut de la tête. Je remets ça en place et je repars.

Mais j’ai encore une sensation bizarre au niveau de la tête. Et cette fois-ci je me rends compte que je suis en train de perdre le bonnet de bain ! C’est bien la première fois que cela m’arrive, il faut un début à tout. Deuxième manipulation et on repart.

7h08, fin de la natation, soit mieux que la fourchette haute que j’avais fixée, à savoir 1h10. C’est donc un bon début mais le chemin est long petit scarabée.

Embrunman 2022, sortie natation

Embrunman 2022 – Vélo 186km / D+3800m

Retour vers mon vélo.

Embrunman, retour vers le parc de transition
Embrunman 2022, transition natation vélo

Je ne pense même pas à évaluer ma position dans la course.

J’enfile la tenue choisie pour aujourd’hui : maillot manche courte, à la fois pour la praticité des poches et pour avoir une couche supplémentaire contre la fraîcheur matinale en montagne. Pour compléter, les manchettes, accessoire idéal pour naviguer entre chaleur et fraîcheur. Après avoir tergiversé, je mets directement les chaussettes de course à pied. De toute façon, à vélo, les chaussettes n’ont pas beaucoup d’importance. Cela m’évitera un changement à la fin du vélo.

Embrunman 2022, départ vélo

C’est parti pour 186km de vélo et 3800m de dénivelé positif dont l’Izoard, une paille !

J’ai étudié le parcours et nous commençons directement par 7km d’ascension pour se mettre en jambes. D’ailleurs, mon voisin de parc m’a prévenu que le conseil des habitués c’est d’y aller cool sur cette première montée.

Embrunman 2022, vélo
Embrunman 2022, en route pour 186km de vélo

Jusqu’ici, les jambes répondent bien mais il ne faut pas trop forcer. Pas question de sentir les mollets ou les cuissots chauffer dès la première ascension.

Je ne sais pas si j’en donne trop mais je remonte les concurrents à une vitesse folle (peut-être une sortie de l’eau très lointaine qui sait). Au bout de 5 minutes je pense que j’ai déjà remonté une cinquantaine de coureurs.

La suite de l’ascension est semblable et au sommet j’ai déjà repris entre 80 et 90 concurrents. Je suis déjà ennuyé par ma vessie, forcément, je n’ai pas réussi à vidanger avant le départ. Par conséquent, je fais un premier arrêt au stand dans la descente. Et du liquide j’en ai absorbé, ce n’est pas un arrêt à la Ferrari, ça prend du temps. La descente pour replonger vers le lac est un peu technique, ce qui me convient bien.

Tout de suite mettre en place le plan d’alimentation établi, à savoir un bidon de 500ml de boisson énergétique par heure et une barre par heure également, complétés ça et là par un gel.

Alimentation de course pour l'Embrunman

Retour sur les bords du lac, et premier point négatif nous avons le vent dans le nez. Certes, il n’est pas fort pour le moment, mais suffisamment gênant pour rajouter de la difficulté.

Et là, c’est le début du jeu du chat et la souris avec les vélos aéro. Et ça, ça m’énerve, même si c’est le jeu. On a l’impression qu’ils avancent tout seul ces vélos. Je me prends des gros vents en ligne droite sur le plat. A l’inverse, dès qu’une bosse se profile, ils se garent à droite et je fonds de nouveau sur eux et m’échappe. Mais alors ça va durer jusqu’au pied de l’Izoard et vraiment je rage !

Retour vers Embrun via Savines-le-lac, un passage où nous partageons la route avec les voitures. Jamais très agréable mais il est tôt, le trafic n’est pas très dense.

A Embrun, nous bifurquons en direction de la station des Orres. Puis, nous virons à gauche pour emprunter la route des balcons de la Durance. Je n’avais pas repéré ce passage, je pensais que nous rejoignions Guillestre par la route principale. Un itinéraire plus champêtre mais également beaucoup plus exigeant.

Heureusement, cela nous permet de nous écarter du vent de face de la vallée, nous sommes un peu plus à l’abri. Pour l’instant je maîtrise mon sujet.

Puis nous rejoignons la grande ligne droite qui mène au rond-point de Guillestre. Encore du vent de face.

Guillestre, c’est ici que commencent les festivités du jour. A partir de là, nous sommes en route vers l’Izoard. Je connais ce col pour l’avoir grimpé en 2016 de mémoire. Je me souviens de la route des gorges du Guil qui est vraiment superbe et très peu pentu pour ensuite, après 15km, bifurquer réellement sur les 13 derniers kilomètres d’ascension du col de l’Izoard.

Dans la route des gorges ça roule vite, j’en garde sous la pédale en prévision du col. Je coince un peu car je n’ai plus d’eau. En effet, je n’ai pas bien repéré les ravitaillements. Or, le dernier était avant Guillestre, à Saint-Clément-sur-Durance et je n’ai pas pris de nouveau bidon. Bilan 28km à parcourir pour le ravitaillement d’Arvieux. Je me retrouve sans eau pendant 50 minutes, pas très bon pour la gestion du carburant.

Arvieux, la délivrance, j’échange mes 2 bidons contre 2 bidons d’eau. J’en profite également pour bien m’asperger. Plus que quelques hectomètres avant d’attaquer la partie dure de l’Izoard.

A la sortie de Brunissard, c’est 6km de montée d’enfer avec des pourcentages entre 8% et 9%. Et là ça pique. Je n’ai pas encore totalement réhydrater le corps, je suis encore un peu dans le dur.

Là, je vais rattraper 2 cyclos qui vont littéralement m’encourager et me permettre de m’accrocher. Jean-Marc, aguerri, le gars qui semble avoir une grosse expérience à vélo et Marie, arborant un magnifique maillot de l’étape du Mont Ventoux. Et Marie elle grimpe. Jean-Marc m’avouera qu’elle a déjà 2 Embrunman à son actif, ceci expliquant cela. Je m’accroche à ce tandem un peu comme un lièvre. Mais je ne suis pas au mieux, je perds des mètres.

Mais ils se retournent régulièrement et m’encouragent : « Vas-y Yann, accroche-toi ! ».

Finalement, je refais surface et je finis mieux l’ascension en compagnie de Jean-Marc, ce qui nous permet de discuter un peu.

Nous nous quittons en haut de l’Izoard et vraiment ils m’ont bien motivé. Merci à eux, ça serait sympa de les recroiser un jour.

En haut de l’Izoard, je récupère mes 2 bidons de boisson énergétique. Je commence déjà à saturer niveau alimentation. Mon intuition se confirme. Mon alimentation est trop peu varié. Au bout de 4 barres quasi identiques, ça devient compliqué.

Pour l’heure, place à mon exercice favori, la descente ! Et le début de la descente de l’Izoard est particulièrement technique. Un enchaînement d’épingles.

L’exercice est simple, on retarde le freinage au maximum pour faire chauffer fumer les patins jusqu’à la limite d’adhérence du pneu arrière. Et tel Valentino, si le pneu arrière décroche c’est qu’on est dans le vrai 🙂 Là, je suis tranquille, je vais plutôt gagner des places. Quelques pointes kilométriques aux alentours des 80km/h, c’est le kiff total.

Dommage le bas de la descente est plutôt favorable aux vélos aéro car peu technique. Et eux j’en ai marre de les voir revenir en permanence.

A Briançon, nous entamons le retour vers Embrun. Et là, la blague, ça me rappelle la Loire à vélo en mai. Le vent qui était de face pour monter vers Guillestre est maintenant de face dans l’autre sens.

Sauf qu’il est beaucoup plus fort. Le retour va être très difficile. Je sais qu’il reste en plus 2 côtes difficiles : la première très courte (1.3km) mais à 11%. La seconde sera à l’entrée d’Embrun, une côte de 6km à 6% de moyenne avant de basculer vers la fin du parcours vélo.

Je sens mon énergie chuter progressivement. Mais pour l’heure, je ne me rends pas compte que cela est dû à mon alimentation. Je fais un second arrêt au stand après la fameuse côte de 11%.

La fin du parcours est un vrai calvaire, le coup de pédale est catastrophique, j’ai envie de chialer sur mon vélo tellement j’en bave. Dès lors, je comprends que passer sous la barre des 12 heures sera impossible. Mais surtout, je commence sérieusement à douter pour la suite. Les concurrents me passent un à un sans que je puisse réagir et m’accrocher.

Dans les 40 derniers kilomètres, je pense en avoir vu passer une bonne vingtaine.

Il faut vraiment que je trouve un moyen de reprendre des forces si je veux m’assurer d’être finisher.

Retour au parc à vélo après 7h15 d’effort. Pas un mauvais temps, mais clairement déçu. Pour moi il y avait clairement la place pour faire moins de 7h sur ce parcours.

Embrunman 2022, retour du vélo

Et dire qu’il faut maintenant débuter un marathon. Heureusement, je ne m’affole pas, je sais que les muscles sollicités ne sont pas les mêmes. Et mes derniers triathlons m’ont prouvé que la course à pied était devenu mon point fort, mieux que le vélo même.

J’ai besoin de faire une pause et de souffler. Ca commence par une première vidange dans les toilettes, 3ème de la journée.

Embrunman 2022, transition vélo course à pied

Je ressors, je commence à m’équiper pour la suite et finalement je retourne de nouveau aux toilettes pour faire le reste.

Embrunman 2022, pause toilettes

Depuis le temps que ça frappait au portillon, c’est une vraie délivrance.

Enfin, après une transition de près de 6min, je suis enfin prêt pour m’élancer à la conquête du statut de finisher !

Embrunman 2022, départ course à pied

Embrunman 2022 – Course à pied 42km

Premier tour de 14km

Premier kilomètre, passage devant la famille. « Ca va moyen », c’est ma réponse à la question du « Comment ça va ? ».

Embrunman 2022, 1ère boucle de 14km

Et ça, c’est la réponse pour ne pas trop inquiéter les proches. En réalité, ça ne va pas vraiment. L’estomac est en vrac. De plus, après 186km de vélo j’ai mal au dos, je n’ai plus d’énergie. Mais les jambes semblent répondre encore présentes, c’est peut-être là-dessus que je dois m’appuyer.

Ma priorité est alors d’atteindre le premier ravitaillement et de trouver des choses qui pourront me rebooster. Je prends aussi mon 1er gel énergétique, j’en ai emmené trois.

Sur ce premier ravitaillement, je mise sur les bananes et les TUC, ce gâteau apéritif salé des années 50 bourratif au possible 🙂 Mais je me dit que j’ai besoin de consistance dans l’estomac. Et bien sûr je m’hydrate.

Les minutes qui suivent sont très encourageantes, je me sens mieux même si ce n’est pas encore l’Amérique.

Second ravitaillement, pas de TUC, je tente banane + pain d’épices. Le pain d’épices a du être sorti depuis longtemps, il est archi sec, je ne me régale pas. Et en plus ça ne va pas être une réussite, j’ai du mal à le digérer j’ai l’impression d’avoir le ventre lourd.

Donc je mise tout sur TUC et bananes pour la suite. Et bien évidemment, boire régulièrement et s’asperger à souhait car il commence à faire très chaud mine de rien.

La première montée vers Embrun passe bien malgré la difficulté, c’est un bon indicateur. Je poursuis sur la 2ème partie du tour qui est la moins exigeante.

Fin du premier tour en 1h08, je ne pouvais pas en espérer autant. Cela me donne un gros coup de boost. Je prends une flasque d’eau au passage dans mes ravitaillements personnels, ce qui me permettra d’avoir de l’eau en permanence et pas uniquement au passage sur les ravitaillements.

2ème tour

En passant devant la famille, je suis une autre personne. J’ai repris le moral. Je me permets même de faire une petite interview improvisée à destination de ceux qui me suivent à distance. Certes, je sais que ce n’est pas gagné, mais je sais aussi qu’il ne reste plus qu’un tour de 14km. S’il se passe sans encombre, même si ensuite tout se dégrade, ce n’est pas grave, coûte que coûte, je pourrai rallier l’arrivée.

Embrunman 2022, début de 2ème boucle de 14km

Second tour, les ravitaillements restent mes alliés. Je suis méthodique, je prends mon 2ème gel. Globalement, la tendance est plutôt positive même si je sens de nouveau le transit se réveiller.

Embrunman 2022, retour du moral

Au passage dans Embrun, je repère une sono qui envoie du gros son. J’ai la connerie dans la peau, je me dis qu’il faut faire quelque chose, j’ai un tour pour y réfléchir 😉 4ème arrêt au stand depuis le début de la journée. Le Manneken pis reprend du service, 6 mois de précipitations sur 10cm2 ! 🙂

Je repars mais comme lors de la transition vélo-course à pied, il faut compléter la vidange. Un 5ème arrêt au stand s’impose, tout en contemplation sur les bords de la Durance, un peu d’épandage pour l’hiver, espérons que ce sera le dernier ! Plus que 5km avant la fin du second tour, mon rythme est toujours correct, la confiance en moi a repris le dessus, je suis bien loin maintenant de mon état d’esprit à la fin du parcours vélo.

Mon instinct me dit que ça va le faire.

Passage au 2ème tour en 1h15min. Franchement, compte tenu de la fatigue et des 2 arrêts au stand c’est un très bon temps pour un 2ème tour (déjà 28km !).

Dernier tour : en route vers le graal de Finisher !

Nouveau passage au niveau de la famille. Même eux, je les sens maintenant beaucoup plus détendus. L’interview de fin du 1er tour les as rassurés. Seconde interview pour faire un petit point sur le concours de pronostics que j’ai organisé. Selon mes estimations, un dernier tour entre 1h40 et 1h50, donc un temps scratch final entre 12h38 et 12h48.

Et je repars. Certes je suis fatigué, mais maintenant, j’en suis convaincu, je vais finir cet Embrunman et je ne vais même pas avoir besoin de marcher 10m.

On reste appliqué sur les ravitaillements liquides et solides. J’essaie de rester sérieux même si je me connais et je commence à décrocher niveau concentration. C’est très souvent le cas sur mes fins de parcours. Notamment, quand je passe à côté de l’objectif ultime que je m’étais fixé. Et comme je l’ai compris depuis la fin du vélo, je ne peux plus passer sous la barre des 12h.

Dernière montée vers Embrun, cette fois ça pique quand même un peu. Dernier passage dans Embrun et là j’ai prémédité ma connerie pendant un tour. Plus rien ne peut m’arrêter. J’interpelle la charmante demoiselle au micro : « On fait un truc là ? ». « Oh il est chaud le monsieur » répond-elle.

Plus rien n’existe que moi et mon délire. Et là je commence par chauffer la rue : « On veut toute la rue avec nous ! C’est simple il suffit de faire des poupoupou poupou poulou ». Et là c’est parti tout le monde joue le jeu et ça donne un moment sorti de nulle part !

Autour de moi c’est l’hallucination complète. Tout le monde se demande quel est ce fou qui vient de prendre le micro. Une petite animation d’1min30sec et je repars comme j’étais arrivé, le temps de me renseigner pour récupérer la vidéo pour le second épisode de la connerie 🙂

Au passage, j’ai même un client en terrasse qui me propose la fin de sa bière. Je prends, je bois, et puis 3m plus loin, je me dis que j’ai peut-être fait une grosse connerie. Je vais peut-être le payer sur les 7 derniers kilomètres.

Le reste du parcours c’est uniquement repenser aux mois passés à préparer ce gros objectif. Les frissons montent, il faut me contenir sinon je vais déjà chialer.

Dernier kilomètre, profite, profite. Tu es finisher et dans un temps tout à fait honorable. J’ai largement surestimé ma baisse d’énergie. Mon dernier tour est bouclé en 1h25, soit le premier marathon de ma vie en 3h49min32sec. Désolé pour les pronostiqueurs qui ont espéré avoir gagné, vraiment ma projection était honnête, je pensais vraiment connaître une baisse de régime plus importante.

La dernière ligne droite, tu as envie qu’elle dure 1h ! La famille m’acclame, ils sont au taquet. Et moi tout se relâche, je chiale comme un taré, la pression retombe.

Je me ressaisie pour la photo sur la ligne d’arrivée : 12h23min11sec ! Puis je m’effondre littéralement, je chiale pendant presque 5 minutes. Je suis tellement heureux.

Cette journée, ça correspond tellement à ce que j’étais venu chercher ici : une AVENTURE !

Je peux récupérer fièrement ma médaille de finisher de l’Embrunman 2022 ainsi que le t-shirt.

Ensuite il me reste à préparer les jours suivants. Deux jeunes kinés de l’école de Marseille s’occupent de mes jambes.

Reste à retrouver la famille, ils sont aussi fiers que moi, sinon plus. Quelle journée !

Embrunman 2022, fin du calvaire

Embrunman 2022 – Résultats et classements

Temps scratch : 12h23min11sec (+2h53min11sec du vainqueur, dernier finisher en 17h15min41sec).

Classement scratch : 100ème sur 725 finishers (43 OTL (Over The Limit, donc disqualifiés), 71 abandons (les 2 chiffres cumulés, ça donne l’étendue des dégâts), 85 non-partants) – Classement complet ici

Classement M2M (45-49ans) : 8ème / 113 (4 OTL, 16 abandons, 11 non-partants)

Temps et classements par discipline :

Natation (3800m) : 1h08min32sec (1min48sec au 100m), 243ème 725

Transition 1 : 4min26sec, 257ème / 725

Vélo (186km / D+3800m) : 7h14min45sec (25.9km/h), 119ème / 725

Transition 2 : 5min56sec, 335ème / 725

Course à pied (42km / D+400m) : 3h49min32sec (5min27sec au km), 114ème / 725

Embrunman 2022 – Le Bilan

D’abord la fierté absolue de rentrer dans le cercle fermé de ceux qui ont vaincu le mythe, l’Embrunman ! Dans la fourchette de mes estimations même si j’échoue dans ma quête des moins de 12 heures.

Médaille du finisher, Embrunman 2022

Ensuite, on passe à l’analyse un peu plus détaillée de la performance.

Une très belle natation compte tenu des paramètres inédits : distance et nuit. Aucun regret, voir même un brin de satisfaction.

La déception sur le parcours vélo. Une déception que j’attribue d’abord à l’alimentation. Je me suis écroulé en fin de parcours. Après coup, je crois même que je me suis auto-suicidé. Lassé par la non variété de mes ravitaillements, j’ai abandonné mon plan de marche et je l’ai payé très cher ! Ensuite, et dans une moindre mesure, les 50 minutes de course sans boisson. Je suis convaincu que je valais moins de 7h sur ce parcours.

Une course à pied conforme qui aurait pu être bien meilleure si je courais après les moins de 12 heures et si je n’avais pas perdu du temps précieux pour retrouver mon énergie après le parcours vélo.

Le gros point noir de cette course c’est donc la gestion de l’alimentation. Pas assez variée comme je l’ai dit, mal préparée.

Mais s’il est bien un paramètre qu’il est difficile de travailler c’est l’alimentation. Vous ne faites pas tous les jours des sorties endurantes de cette exigence. Il est alors donc difficile d’acquérir de l’expérience en la matière. Varier, trouver des recettes maison, aller à la pêche aux conseils sur Internet, tel sera mon prochain objectif.

Le gros point positif c’est enfin une solution trouvée pour mes pieds fragiles. Et grâce à qui ? Ninnie ! 10 jours de massage intensif des pieds le soir avec la crème NOK d’Akiléïne auront eu un effet incroyable. D’habitude, au-delà de 15km parcourus, mes pieds souffrent et j’ai des énormes ampoules, voir les pieds en sang. En conclusion, je termine mon marathon avec une seule petite ampoule à un orteil.

Crème Akiléïne NOK, renforcement des pieds

Question récupération : parfaite, presque insolente. Le mercredi, soit le surlendemain de la course, je me rends, comme à mon habitude, en vélo à la gare. Je ressens quelques faibles douleurs dans les cuisses. Dès le soir je ne sens plus rien. Les jours suivants, je n’ai pas non plus la fatigue habituelle. L’hydratation me souffle le frangin. Moi je reste sur l’idée d’une alimentation en course très mal gérée.

Pour moi je n’ai pas pu aller au bout de l’effort et donc j’ai récupéré très vite. Tort ou raison, en tout cas c’est mon analyse !

Pour le poids, 12h23 d’effort ça ne vous fait pas perdre 1 gramme. Le poids avant le départ était de 63kg, à l’arrivée il est même plutôt autour de 63.5kg.

Pesée avant l'Embrunman

Autre surprise, je pensais à une dégringolade de la motivation après un tel exploit. Rien de cela, je ne suis pas rassasié et je suis tout heureux de remonter sur le vélo à J+4.

Voilà tous mes remerciements d’abord à ma Ninnie qui a été extraordinaire de sang froid pour absorber le stress, animer le groupe Whatsapp des supporters, faire les photos, se réveiller très tôt, supporter les longs mois de préparation. La vie de femme de triathlète, c’est un peu chiant parfois ! Merci à mes enfants qui continuent, malgré tout, à me dire que « c’est nul » si j’arrête le triathlon.

Mes remerciements ensuite au frangin et mes neveux et nièce qui sont venus me supporter sur place pour vivre cet événement hors norme. J’espère qu’ils ont apprécié ce moment au cœur d’un mythe du triathlon.

Clin d’œil à mes pacers de l’Izoard !

Et mes remerciements appuyés à tous mes supporters à distance, famille et amis, qui ont suivi l’évolution de la course. Spéciale dédicace à Chubi et bibi qui ont réalisé cette vidéo hommage qui m’a fait vraiment chaud au cœur.

Enfin félicitations aux lauréats du concours de pronostic : Jean-Marc (12h22 quel sens du pronostic), Stéphanie et Julien. Ils repartent avec un cadeau, certes symbolique.

Et l’après l’Embrunman ?

Quand y’en a plus y’en a encore ! C’était l’autre objectif de la saison, participer à cette énorme fête du triathlon dans les Vosges, à Gérardmer.

Donc on remet le bleu de chauffe et dans 3 semaines, c’est reparti pour un format longue distance.

Encore un superbe week-end en perspective avec des accompagnateurs, de l’ambiance et espérons, le beau temps !

Tchao et sportez-vous bien !

6 réflexions sur “Embrunman 2022 : Finisher du mythe !

  • Ping : Lina à Ternand, épisode final - BogotadesnouvellesdeManu

  • Ping : Lina à Ternand, épisode final – Bogotadesnouvellesdemanu

  • Félicitations encore pour cet Embrunman. Chapeau bas pour la performance. Et oui, nous étions très contents d’être là le jour J. Bravo aussi pour l’hommage à Sacha Distel et son incendie à Rio, du grand art !! Quel talent !!! Bises

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    • Merci frangin, je me doutais que tu avais la ref 🙂 Il fallait être là car très mince chance qu’il y en ait un second !

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  • Bon ben que dire, après l’exploit sportif hors du commun et je pèse mes mots, une narration également de haute volée!! bravo pour cet effort quasi surhumain, je regrette de n’avoir pu en être en vivo, je n’ai suivi que de loin! Abrazo

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    • Merci l’ami, pas surhumain si on se prépare correctement mais pas neutre effectivement.

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